CABARET

affiche cabaretFilm de Bob Fosse
(Drame / film musical – USA – 1972 – 2h04 – V.O.S.T.)
Avec: Liza Minnelli, Michael York, Helmut Griem…
Film présenté dans le cadre du festival Roman & Cinéma

Berlin, début des années 30. Au Kit Kat Klub, le Meneur de Jeu accueille la clientèle, milliardaires et escrocs. Un jeune étudiant anglais s’installe à la pension Schneider. Sa voisine, une femme-enfant exquise et aguicheuse, du nom de Sally Bowles, chante au Kit Kat Klub. Autour du cabaret, le nazisme gronde …

« « Willkommen, bienvenue, welcome »… Ces mots suffisent aujourd’hui à convoquer le cabaret tel que Bob Fosse l’a imaginé, un poil cynique et décadent avec toujours dans l’ombre une Liza Minnelli sexy et pétillante. Le film aurait pu se réduire à cela : un joyeux foutraque où se mêlent des chansons cultes, des morceaux de bravoure chorégraphiés et huit oscars en guise de rançon de la gloire. Il faut reconnaître que le projet était risqué et pas dénué de contradictions. En effet, comment parler de la montée du nazisme par le biais d’un genre léger et innocent. Mais loin de rejeter ces contradictions, Bob Fosse les exhibe pour en faire le noyau dur de son film. Il n’a pas peur non plus de questionner la forme même du musical pour mieux la renouveler. C’est sûrement ce qui explique pourquoi, quarante ans après sa première sortie en salles, Cabaret n’a rien perdu de sa force subversive et du malaise qu’il suscite chez les spectateurs. Chorégraphe émérite de Brodway, Bob Fosse passe à la réalisation en 1969 avec Sweet Charity, comédie musicale inspirée des Nuits de Cabiria de Fellini  […]. Avec Cabaret, Bob Fosse marque un tournant dans l’histoire de la comédie musicale. Le film est inspiré du spectacle créé à Broadway en 1966 qui était lui-même une adaptation du roman Adieu à Berlin de Christopher Isherwood et de la pièce I Am a Camera de John Van Druten. Pour les besoins du tournage, Bob Fosse transforme légèrement l’intrigue, change quelques nationalités, se défait de certains personnages et de toutes les chansons hors du Kit Kat Klub. Enfin, qui mieux que Liza Minnelli pouvait servir d’emblème au renouveau d’un genre porté au firmament par Minnelli père ? […] Là où Cabaret frappe fort, c’est dans sa capacité à générer un nouvel imaginaire à travers des chorégraphies qui ont fait date, dans la manière dont les numéros musicaux du Kit Kat Klub s’intègrent en contrepoint à l’action filmée de manière plus classique et aussi dans la subtilité avec laquelle le film parle avec allégresse de thématiques subversives (la bisexualité, l’avortement). N’oublions pas que si l’Amérique fait sa révolution sexuelle, on n’est qu’à l’aube des années 1970. Parler de plan à trois n’a évidemment pas les mêmes portées qu’aujourd’hui lorsque Britney Spears s’en félicite sur les ondes. Près de dix ans après West Side Story qui amorçait déjà la transition, Cabaret finit de faire entrer le musical dans l’âge adulte. Adieu donc happy-end et bons sentiments. Place au cynisme, au traitement percutant de l’histoire (en l’occurrence la montée du nazisme) et à la mise en question de la forme même. Car la « Fosse identité », c’est aussi une tentative constante d’auto-réflexion sur le genre. « Chicago » en est la meilleure expression. Fosse y brise toute tentative d’illusion réaliste en invitant l’orchestre jazzy sur scène et en obligeant les chanteurs/danseurs à être perpétuellement sur scène même lorsqu’ils ne jouent pas. Les voilà réduits à être tantôt acteurs, tantôt spectateurs de leur propre mascarade. Logiquement, Cabaret n’échappe pas à la règle par un système subtil de mise en abyme et d’effets de miroirs. Dès la scène d’ouverture, formidable de précision, les règles du jeu nous sont données par le diabolique Joel Grey, maître de cérémonie dont le visage clownesque nous apparaît par le biais d’un miroir déformant. À la manière d’un narrateur ophülsien, il se présente ainsi comme le guide d’une ronde musicale et grotesque que l’on déguste avec un plaisir coupable. Par ses nombreuses invectives face caméra (le musical est peut-être le seul genre qui permet de transgresser tacitement l’un des plus gros interdits du cinéma), le maître de cérémonie oblige le film à se dérouler dans une perpétuelle conscience de ses spectateurs dédoublés, eux, qui sont tantôt témoins des amours contrariés de Sally Bowles, tantôt aux premières loges du Kit Kat Klub. Des classiques comme Tous en scène ou encore Une étoile est née avaient déjà trouvé une manière de rendre crédibles les respirations chantées en faisant se dérouler l’histoire dans le milieu du music-hall. Cabaret pousse à l’extrême le concept puisque presque toutes les chansons sont extérieures à l’action principale et se passent dans le cadre du cabaret. Si pour certains numéros la frontière entre le pur spectacle et le monologue intérieur d’un personnage peut paraître floue, les chansons s’intercalent avec une illusoire gratuité pour mieux porter un regard ironique sur les protagonistes ou les situations. […] »
Nicolas Maille – Critikat.com

Séance

Vernoux (espace culturel Louis Nodon)
dimanche 05 octobre à 16h

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