EASY RIDER

affiche-easy-riderFilm de Dennis Hopper
Drame, aventureUSA – 1969 – 1h30 – VOST
Avec Dennis Hopper, Jack Nicholson, Peter Fonda, Phil Spector, Warren Finnerty
Ciné mémoire

(…) il y a dans la naïveté d’Hopper et de Fonda quelque chose de direct, de sympathique : quelque chose qui tient de l’acte de foi, du désir sincère de déclarer au monde : « Voilà comment nous sommes ».
Le Monde 1969

Dennis Hopper (décédé en mai dernier) et Peter Fonda instillent l’angoisse comme un subtil venin, étouffant le rêve de liberté et d’évasion. Ils livrent une critique virulente de l’Amérique moyenne, normative, puritaine et mortifère. Profondément pessimiste, déroutant et envoûtant dans sa forme, Easy Rider est un vrai film d’auteur et, sous ses rides, reste étrangement d’actualité.
Télérama

SYNOPSIS

Deux motards traversent les États-Unis pour en découvrir les charmes caches… Les cotes pile et face de l’Amérique.

CRITIQUE

Objet culte, le premier film de Dennis Hopper, Easy rider, est une quête hallucinée carburant à l’essence, aux acides et au scepticisme.

Pour apprécier pleinement Easy rider, il convient d’oublier tout ce que vous avez toujours cru savoir à son sujet, sans même peut-être avoir osé demander à voir le film pour vérifier sur pièces. Or, sa réapparition aujourd’hui sur les écrans permet de constater avec quelle netteté s’impose l’évidence que le premier long métrage de Dennis Hopper possède une force de captation saisissante, et vaut sans conteste beaucoup mieux que le statut infiniment galvaudé de film culte d’une génération. Commettrait d’ailleurs un contre-sens manifeste celui qui s’ingénierait, recul
du temps oblige, à resituer Easy rider dans un contexte historique dont à l’époque déjà il n’aspirait qu’à sortir ­ et plutôt mort que rendu. Il faut donc clamer ici qu’Easy rider n’est pas un tribut béat payé au pouvoir de la fleur ni une défense et illustration chatoyante du credo baba cool (« Faisons pousser de l’herbe, roulons-nous nus dedans, fumons-la et puis recommençons ») alors à son apogée.

Témoignant d’une foncière indépendance d’esprit, Hopper affiche au contraire un scepticisme certain face à cette utopie collectiviste au poil long ­ scepticisme très perceptible au cours de la brève halte dans la communauté hippie bivouaquant au milieu des caillasses. Loin de se focaliser sur cette cible tout de même trop facile, le regard satirique de Hopper trouve maintes autres occasions de s’exercer, tant il apparaît vite que la route qu’ils traversent, lui et son acolyte (incarné par un Peter Fonda au sex-appeal immarcescible), sera jonchée d’ambulances sur lesquelles canarder à volonté ­ même si, impitoyablement, le droit du plus fort s’appliquera et les vrais marginaux, épris d’espace et d’aventure, seront éliminés et jetés dans le fossé. Auparavant, durant leur périple au cœur du cauchemar climatisé, le cul-terreux homophobe antijeunes en aura pris pour son grade au même titre que le chevelu hébété vivotant de partouzes et d’hasch frais.

Toutefois, l’impact d’Easy rider dépasse celui d’une simple critique de mœurs ­ aussi nécessaire et saignante soit-elle ­ grâce à la furieuse liberté créatrice qui l’anime de part en part. A cet égard, le premier plan dans le film, après quelques minutes de chauffe, où l’on voit nos deux lascars cavalcader au soleil en direction d’un eldorado inaccessible, eh bien ce plan-ci exhale une impression de possibilité rarement ressentie à un pareil degré. C’est d’autant plus remarquable que le film n’a de cesse par la suite de repousser les limites du champ de cette possibilité mise à nu par ses prétendants. Ce penchant jusqu’au-boutiste confère à Easy rider une touche expérimentale très marquée, en particulier lors de la fameuse scène sous acides au cimetière de La Nouvelle-Orléans, ultime montée avant l’inexorable chute. Si elles doivent évidemment à Jack Kerouac et à des films comme Macadam cowboy, ces tribulations de deux Américains en Amérique peuvent davantage encore se rapprocher de Delivrance, du cinéma de Peckinpah ou encore, et surtout, du Las Vegas parano d’Hunter Thompson, autre quête hallucinée d’un rêve pulvérisé. Nanti, enfin, d’une BO chromée qui n’a pas peu fait pour sa renommée, Easy rider n’a pas renié sa ligne de conduite, telle qu’elle est chantée par Steppenwolf : né pour être sauvage, ce film l’est toujours un quart de siècle après.

Jérôme Provençal – Les Inrockuptibles

SÉANCES

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