J’AVANCERAIS VERS TOI AVEC LES YEUX D’UN SOURD

affiche-j-avanceraisFilm de Laetitia Carton
(Documentaire – France – 2016 – 1h45)
Printemps Documentaire

SYNOPSIS

Ce film est adressé à mon ami Vincent, mort il y a dix ans. Vincent était Sourd. Il m’avait initiée à la langue des signes. Je lui donne aujourd’hui des nouvelles de son pays, ce monde inconnu et fascinant, celui d’un peuple qui lutte pour défendre sa culture et son identité.

CRITIQUE

« «Une fois le noir fait, il faudrait laisser un temps, pour que les entendants acceptent le silence», est-il dit au détour d’une des scènes captées par la caméra de Laetitia Carton, dans un théâtre où se répète un spectacle en langue des signes. Le film procède à l’inverse, s’ouvrant sur un flot calme de voix off adressé à Vincent, un ami disparu, pour s’évider peu à peu des échanges oraux à mesure que les interventions de la documentariste s’espacent, édicter ainsi un régime énonciatif où les échanges se donnent à observer plus qu’à entendre. Conçu du vivant de Vincent mais achevé dix ans après sa mort, J’avancerai vers toi avec les yeux d’un sourd se conçoit comme un parcours d’intervention, tout à la fois didactique et militant, au sein d’une communauté qui se refuse à envisager la surdité en handicap, la revendiquant plutôt comme une culture. Soit les codes constitués d’un être au monde parmi tant d’autres, éventuellement «subversif et libertaire», dans son aspiration à une différence affranchie de la norme dominante. Dans son émiettement, la forme du film croise les destins diversement versés dans cette revendication culturelle, autour de laquelle s’affrontent de longue date les tenants de la langue des signes et ceux de l’oralisation (absents du film). Les premiers voyant en les seconds (historiquement majoritaires en France) les suppôts d’une uniformisation fanatique des individualités sourdes, assujetties à une infantilisation par les proches, à d’épuisants appareillages et à des parcours bornés de toutes parts. Égrenant quelques scènes frappantes (d’une élection de miss Sourde au conte des trois petits cochons relaté par un père à ses gosses en langue des signes à l’heure du coucher, sans intercession de sous-titres) et attachants portraits de figures aux itinéraires variés, qui n’ont de similaires que la somme des vexations qui les constituèrent, le cheminement de la réalisatrice à travers ce «pays» sans frontières s’écrit sans grand souci affiché de ses formes. Mais, par-delà ses traits sensibles et son attention à l’expressivité des corps tandis qu’ils «signent», l’attrait du film tient aussi aux termes singuliers par lesquels il interroge une idée du communautarisme : non comme un repli, mais plutôt la voie d’une inclusion plus harmonieuse à une société obstinément aveugle aux caractères particuliers qui la nourrissent. »
Julien Gester – Libération

SÉANCES

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