LA PIROGUE

Film de Moussa Touré
(Drame – France / Sénégal – 2012 – 1h27 – V.O.S.T.)
Avec: Souleymane Seye Ndiye, Laïty Fall, Malamine Drame …

D’un village de pêcheurs près de Dakar part une pirogue. A son bord, un capitaine improvisé, Baye Laye, et une trentaine d’hommes déterminés à rejoindre l’Espagne. Peu d’entre eux ont conscience des dangers du voyage, et certains n’ont même jamais vu la mer… Les heures et les jours passent. D’une vague à l’autre, les rêves perdent de leurs couleurs, la bonne humeur s’inquiète. Les sourires s’estompent sous les regards méfiants. Ce n’est pas dans sa manière de dire l’histoire que La Pirogue cherche à surprendre. Lisiblement enchaînées les uns aux autres, les péripéties se succèdent et s’accumulent, inévitables, dans la trajectoire d’un destin. Peinte avec une rigueur documentaire, cette fiction nourrie d’un réel inquiétant est racontée avec une pudeur sans naïveté qui étonne, tant on s’attend à sentir l’urgence de dire, qui excuse tant de maladresses. Point de tout cela : modération, justesse, nuances, dès cette première scène de lutte où se mélangent sans heurts modernité et folklore. Les combattants s’arrosent de différents liquides exigés par la coutume à l’aide de bouteilles en plastique. Les spectateurs les encouragent en chantant et en tapant des mains. Ils portent des vêtements traditionnels ou contemporains, négligent parfois le spectacle pour consulter un téléphone portable. Qui peut définir cette réalité, circonscrire ses limites ? Séparer ce qui vient d’ailleurs de ce qui vient d’ici, celui qui reste de celui qui part ? Sur le bateau, le réel s’assombrit. Dans le huis-clos mouvant de la pirogue, le seul à connaître la vérité est le fou, Yaya, pris dès le début de panique. Il pleure, et geint. Il faut l’attacher, de peur que son angoisse ne se transmette, et la vérité avec elle. Sans pesanteur ni jugement, le film donne à voir avec patience et élégance tout ce qui fait la nature singulière de ce voyage : les paranoïas et les solidarités nouées, l’urgence du bouc émissaire, la mort crainte, oubliée, indifférente. Tout ce qui fait ce voyage, également, à la semblance de tant d’autres : le chant qui s’élève pour estomper la peur, comme la musique de l’orchestre du Titanic accompagnant le naufrage. C’est en montrant ce que nous ne nous attendions pas à reconnaître que La Pirogue surprend, dérange, éveille : ce Radeau de la Méduse contemporain, nous préfèrerions le croire dans tous les sens du terme à l’autre bout du monde. Ce film qui invente le huis clos à ciel ouvert est une sacrée aventure.

Bande annonce

Lamastre (centre culturel) :
vendredi 01 février à 21h
mardi 05 février à 20h30

Vernoux (salle Louis Nodon) :
samedi 02 février à 18h
lundi 04 février à 20h30

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