AQUARIUS

affiche-aquariusFilm de Kleber Mendonça Filho
Drame, thriller – Brésil, France – 2016 – 2h25 – VOST
Avec Sonia Braga, Maeve Jinkings, Irandhir Santos, Humberto Carrão, Zoraide Coleto

« Aquarius », œuvre immense, avance à pas feutrés, se donne des airs de telenovela, joue la carte de l’intime alors qu’elle raconte autant le destin de cette femme que celui du Brésil et notre époque. 
Le Nouvel Observateur

La finesse et l’originalité de Mendonça Filho reposent sur le jaillissement de l’humain malgré tout. Sur sa force dans l’adversité. Sur l’universalité du combat. Aquarius est un acte de cinéma.
Bande A Part

« Aquarius » est un film à la fluidité mystérieuse, souvent solaire et parfois sombre (…) l’une des révélations majeures du cinéma d’aujourd’hui.
La Septième Obsession

SYNOPSIS

Clara, 65 ans, est critique de musique retraitée. Veuve, elle a trois enfants aujourd’hui adultes et vit dans dans un appartement plein de disques et de livres situé dans l’immeuble « Aquarius ». Mais Clara a un talent particulier : elle voyage dans le temps.

CRITIQUE

A la plage ou dans sa cuisine, elle se déplace comme une déesse athlétique. Veuve olympienne d’une soixantaine d’années, mère de trois enfants désormais grands, Clara vit seule, à Recife, ville du nord-est du Brésil, dans un grand appartement, face à la mer. Ce lieu est pour elle chargé d’histoires et de souvenirs, qui affleurent parfois, en flash-back apaisants. Aujourd’hui, l’appartement est tapissé d’une collection impressionnante de vinyles : la musique est la passion de Clara, elle en a fait son métier, elle a été critique, a écrit des livres. A toute heure du jour ou de la nuit, saisir tel disque de bossa-nova, de pop ou de rock, poser le saphir, écouter religieusement son morceau et danser seule au milieu du salon font partie de ses multiples plaisirs. Menacés. Car Clara doit faire face au harcèlement constant voire à l’intimidation d’un promoteur immobilier qui a racheté tous les autres appartements de l’immeuble, désormais désert. De propositions alléchantes, elle ne veut pas entendre parler. Au risque de passer pour une folle, ce qu’elle veut, c’est rester ici.

Deuxième long métrage de Kleber Mendonça Filho, Aquarius instaure un climat de tension captivant, à la lisière du fantastique, sinon du mauvais rêve. Le talentueux cinéaste a repris une part du dispositif à l’oeuvre dans Les Bruits de Recife, qui quadrillait un quartier résidentiel flambant neuf et hyper sécurisé. Cette fois, il s’est focalisé sur un personnage central de la classe moyenne aisée et éclairée, Clara. Ce qu’il décrit, avec minutie, ce sont ses relations, les liens qu’elle entretient avec son passé, sa famille, ses amies, son employée de maison, le voisinage, les rencontres d’un soir. Un portrait tout en subtilité, exécuté par touches sensuelles, mais aussi implacables : ce plan fugitif dans la salle de bains, révélant un sein amputé, après un cancer. Hier malade, marquée par diverses épreuves, cette mère orgueilleuse continue malgré tout de jouir de la vie, n’hésitant pas à faire appel à un gigolo. Une femme forte, donc, non dépourvue d’égoïsme et d’obstination ? Le portrait, riche d’ambiguïté, n’est pas que flatteur.

Entre chronique, douce divagation et guerre froide, la force du film est de dépasser la situation individuelle de Clara pour une allégorie plus large, sociale et politique, de la société brésilienne contemporaine — ses mutations comme ses immobilismes. Aquarius montre bien comment la spéculation et la corruption gangrènent les fondations du pays, divisent, engendrent de nouvelles formes de domination insidieuse. Sur l’agressivité du libéralisme, sa façon de faire table rase en obéissant à une vision à court terme, le cinéaste fait mouche, sans céder à la démonstration. Qu’il y ait conflit ou concorde, moments de solitude ou de joie collective, sa mise en scène est pareillement fluide.

Ce n’est pas un hasard si le cinéaste a choisi Sonia Braga, objet de fierté nationale, sex-symbol hier avec des films comme Dona Flor et ses deux maris, pour incarner à la fois la liberté et l’union. Elle est parfaite, osant se mettre à nu, se montrant tour à tour voluptueuse et intraitable. A travers ce rôle de sexagénaire résistante, il y a fort à parier que Kleber Mendonça Filho ait projeté beaucoup de lui-même, de ce qu’il aimerait être, au même âge.

Jacques Morice – Télérama

SÉANCES

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