Film de Bertrand Tavernier
(Comédie – France – 2013 – 1h53)
Avec: Thierry Lhermitte, Raphaël Personnaz, Niels Arestrup, Anaïs Demoustier …
Alexandre Taillard de Vorms est un ministre des Affaires Étrangères plein de panache, qui rayonne de la tribune des Nations Unies jusque dans la poudrière de l’Oubanga. Le jeune Arthur Vlaminck, jeune diplômé de l’ENA embauché pour écrire les discours du ministre, doit apprendre à composer avec la susceptibilité et l’entourage du « prince », et se faire une place dans un Quai d’Orsay où le stress, l’ambition et les coups fourrés ne sont pas rares…
“Il aura donc fallu 40 ans pour que Bertrand Tavernier réalise sa première comédie. Il y avait tout dans la bande dessinée à succès de Blain et Lanzac (de son vrai nom Antonin Baudry, « plume » de Dominique de Villepin entre 2002 et 2004) pour inspirer ce cinéaste passionné de politique et d’histoire, et qui a toujours aimé filmer les gens au travail (L.627, Ça commence aujourd’hui). Le ministère des Affaires étrangères, cette ruche avec ses couloirs sans fin, ses codes, son jargon diplomatique — ou pas —, ses conseillers qui bossent jour et nuit pour préserver l’équilibre du monde : dans ce huis clos en or (de la République), Tavernier orchestre un vaudeville malicieux, juvénile, incroyablement rythmé, où monsieur le ministre fait claquer les portes comme personne. Ce n’est pas Occupe-toi d’Amélie !, mais « occupons-nous d’Alexandre ! » : Alexandre Taillard de Worms, bel homme à la crinière argentée, bouillonne, brasse du vent et souligne au Stabilo jaune les grands auteurs qui lui semblent signifiants. Dans la peau de ce Villepin pour rire, Thierry Lhermitte, bluffant, rappelle les meilleurs comédiens burlesques de l’âge d’or hollywoodien. Pendant qu’il gesticule, les membres de son cabinet s’occupent vraiment des dossiers. Quitte à louper le déjeuner, au grand dam du conseiller pour le Moyen-Orient (savoureux Bruno Raffaelli), ou à faire de surprenantes microsiestes, comme Maupas, le chef de cabinet. Dans le registre doux du gros chat épuisé qui en a vu d’autres, Niels Arestrup, à contre-emploi total de ses rôles habituels, est hilarant. De quoi ébahir le jeune Arthur Vlaminck (Raphaël Personnaz, parfait ingénu de comédie), fraîchement enrôlé par le ministre pour faire « du langage » : écrire ses discours et apprendre à caser des citations d’Héraclite dans une intervention sur… la guerre du hareng ! Un ministère, nous souffle le cinéaste, moqueur mais jamais méprisant, ce devrait être comme une bonne troupe d’acteurs : beaucoup de talents conjugués, même si, au final, c’est la vedette qu’on applaudit à l’ONU. Le ministre, en effet, finit par prouver sa grandeur dans un discours éclatant. Pour Tavernier, le jeu politique en vaut toujours la chandelle. »
Guillemette Odicino – Télérama
Saint Félicien (salle des fêtes)
vendredi 14 février à 20h30