THE GRAND BUDAPEST HOTEL

affiche the grand budapest hotelFilm de Wes Anderson
(Comédie – USA – 2014 – 1h40 – V.O.S.T.)
Avec: Ralph Fiennes, Tony Revolori, Harvey Keitel, F. Murray Abraham, Mathieu Amalric …

Le film retrace les aventures de Gustave H, l’homme aux clés d’or d’un célèbre hôtel européen de l’entre-deux-guerres et du garçon d’étage Zéro Moustafa, son allié le plus fidèle. La recherche d’un tableau volé, oeuvre inestimable datant de la Renaissance et un conflit autour d’un important héritage familial forment la trame de cette histoire au coeur de la vieille Europe en pleine mutation.

« Les hasards de la distribution nouent parfois de féconds dialogues. Only Lovers Left Alive et The Grand Budapest Hotel semblent ainsi faits pour se répondre. Les deux films nous parlent de fin de règne, de crépuscule d’un monde, de deuil d’un système de valeurs tenu pour la civilisation tout à coup rudoyé par la montée de forces qui ne croient plus en ces valeurs. Les incarnations de la barbarie diffèrent cependant : le libéralisme chez Jarmusch ; le fascisme pour Anderson. Mais les réponses à la barbarie diffèrent aussi. Le dandysme d’Adam, le vampire post-grunge d’Only Lovers…, est défensif. Cette posture l’accule à l’autarcie. Si le monde va à sa perte, autant fermer les volets et ne plus sortir. Le dandysme de Monsieur Gustave, l’un des deux héros de The Grand Budapest Hotel, est au contraire absolument offensif. Son objectif conquérant est de façonner le réel à l’image de ses bonnes manières. Gérant du Grand Budapest Hotel et gigolo à ses heures, il veut croire que son extrême civilité est forcément contagieuse et peut vaincre toute forme d’adversité.(…) Prestidigitateur exaltant et illuminé, metteur en scène génial de son propre monde, il parvient à y faire entrer tous ceux qu’il croise. Son exquise politesse (en toute occasion) est bien plus qu’un signe de classe ; elle devient une forme morale. Il est néanmoins un mur sur lequel vient buter cette distinction comportementale : celui dressé par l’histoire à ses heures les plus noires, le fascisme donc. La civilité de Monsieur Gustave est avalée par la faillite d’une civilisation. Non, le dandysme ne peut pas sauver durablement du chaos – et c’est un dandy qui le dit, un cinéaste qui a constitué le style, le choix d’un papier peint rouge ou d’un costume vert pomme, l’abondance de petits panoramiques horizontaux maniaques ou la miniaturisation de tout en mise en ordre harmonieuse du monde. Mais la barbarie est à double détente. Il est une force dans le récit, plus destructrice que l’armée fasciste qui fusille des innocents. Ce courant délétère, qui a raison du régime fasciste comme de tout autre, qui recouvre de cendres égales la civilisation et la barbarie, c’est le temps. Le cinéma de Wes Anderson nous avait habitués à déployer spatialement le motif du labyrinthe. Le bateau de Steve Zissou, le terrier de Mr. Fox, le Grand Hotel Budapest sont de grands jeux de l’oie, où les cases s’imbriquent de façon complexe et cachent des trappes et des doubles-fonds. Dans ce nouveau film, pour la première fois, le labyrinthe devient temporel. Le film débute aujourd’hui, puis saute en 1985, fait un bond en 1968, pour finalement trouver son rythme de croisière dans les années 30. Il se clôturera en toute logique en effectuant ce grand saut de haies temporelles à l’inverse. L’histoire est composée de mondes gigognes qui s’emboîtent, de grands systèmes (fasciste, communiste, libéral…) qui s’entredévorent, opposés mais identiques dans leur devenir-ruine. Les mondes disparaissent les uns après les autres comme on referme un éventail, et l’entropie est le sujet enfoui de ce film de prime abord acidulé et sautillant. Mais de ce progressif enlisement de tout, Wes Anderson préserve une chose : l’œuvre. Et en dernière instance se désolidarise du même coup de son personnage principal. Monsieur Gustave était un dandy ultime. Son œuvre, c’était sa vie (et inversement). Et de ce genre d’œuvre-là, rien ne perdure, sinon quelques anecdotes dans le cerveau fatigué de ceux qui lui ont survécu. Pour Zero, son fidèle lobby-boy, ce n’est pas suffisant. Comme un animal soucieux de la perpétuation de son espèce à la recherche du meilleur endroit pour pondre ses œufs, Zero, devenu vieux proprio de l’hôtel décati, voit soudain dans un jeune client écrivain la possibilité d’une postérité à la grande affaire de sa vie. Il est beaucoup question d’héritages dans le film (un tableau de maître, un hôtel) mais c’est surtout d’un récit dont on hérite in fine. Le film est un acte de fécondation. Un vieil homme trouve le bon interlocuteur pour que son expérience biographique, périssable, lui survive. Et la chaîne des flash-backs emboîtés, qui nous ramène de 1932 à nos jours, où une jeune fille lit le roman The Grand Budapest Hotel, raconte ce siècle de gestation qui permet à une vie humaine de survivre à soi-même. Le dandysme de M. Gustave a bien sûr toute l’affection du cinéaste. Mais sans la figure plus grise de l’écrivain, filmé comme un petit fonctionnaire laborieux assez peu glamour, il n’en resterait rien. C’est la morale, au bout du compte assez peu dandy, du film. Face à toutes les barbaries, le travail importe plus que le style. »
Jean-Marc Lalanne – Les Inrocks

Ce film est précédé du court métrage:
FUCK UK
Film de Benoît Forgeard
(Fiction – France – 2012 – 13′)

Michel souffre d’une étrange pathologie. Une forme de racisme rare et parfaitement désuète : la haine de l’Anglais.

Vernoux (salle Louis Nodon)
samedi 29 mars à 21h
dimanche 30 mars à 17h
lundi 31 mars à 21h

Lamastre (centre culturel)
vendredi 28 mars à 21h
samedi 29 mars à 21h

Chalencon (salle polyvalente)
dimanche 30 mars à 20h30

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