Film de Roy Andersson
(Comédie dramatique – Suède – 2015 – 1h40 – V.O.S.T.)
Avec: Holger Andersson, Nisse Vestblom, Charlotta Larsson, Viktor Gyllenberg, Lotti Törnros …
Lion d’Or – Mostra de Venise 2014
Sam et Jonathan, deux marchands ambulants de farces et attrapes, nous entraînent dans une promenade kaléidoscopique à travers la destinée humaine. C’est un voyage qui révèle l’humour et la tragédie cachés en nous, la grandeur de la vie, ainsi que l’extrême fragilité de l’humanité.
« Ce titre, qui se déploie avec une sympathique extravagance, on le verrait bien déborder de la page, de l’affiche… Le Suédois Roy Andersson ouvre la cage du cinéma, le libère des conventions du scénario et de la mise en scène. Pour nous entraîner dans un monde réaliste mais entièrement recréé en studio. Là, tel l’artiste dans son atelier, il compose des plans toujours fixes et savamment cadrés, des tableaux vivants. Les saynètes se succèdent, poétiques, drolatiques, énigmatiques. Et nous voilà, nous spectateurs, transformés en visiteurs d’une étonnante exposition… Le premier de ces tableaux montre, justement, une sorte de musée d’histoire naturelle où un visiteur, les cheveux en crête de coq, observe un oiseau empaillé dans une vitrine. Le volatile semble très normal, mais celui qui le regarde est un curieux spécimen. C’est lui qui mériterait d’être dans la vitrine… L’homme, c’est l’obsession de Roy Andersson, qui termine ici en beauté, avec un Lion d’or récolté au festival de Venise, sa « Trilogie des vivants », après Chansons du deuxième étage (2000) et Nous, les vivants (2007). Comment être un humain ? La question s’inscrit d’emblée à l’écran et on entendrait presque la voix du cinéaste ajouter, sur un ton compréhensif : c’est si difficile… Pour en témoigner, voici deux vendeurs de farces et attrapes. Ils ont un mal de chien à trouver preneur pour leurs dents de vampire et vivent dans la dèche, perdant presque foi en leur mission : aider les gens à rire. Roy Andersson s’y emploie lui-même, avec beaucoup d’esprit. Il nous amuse en croquant des humains anonymes, silhouettes plus que personnages. Régulièrement pendus au téléphone, ils disent tous la même chose : « Je suis content de savoir que vous allez bien. » A l’autre bout du fil, tout se passe mal, alors ils répètent désespérément : « Je disais que je suis content de savoir que vous allez bien ! » La formule résonne dans une immense solitude : se réjouir que tout aille bien, c’est avoir l’air d’être tombé sur la tête… Si Roy Andersson est pessimiste, il sait être chaleureux. La fantaisie illumine ce cinéma indompté, qui n’hésite pas à nous bousculer en télescopant les époques, à nous imposer un rythme contemplatif et exigeant. Si la mise en scène du cinéaste se rapproche du burlesque à la Jacques Tati, elle suit sa propre musique. Comme dans ce tableau chanté où Lotta, une aubergiste boiteuse de Göteborg, accepte que les verres de schnaps soient payés par des baisers ! C’est en choeur que la tendresse et la fraternité se célèbrent… Sauf que pour parler de l’être humain il faut, aussi, évoquer sa barbarie, les crimes dont il est capable. Ainsi l’un des vendeurs de farces et attrapes déclare-t-il avoir vu « un truc horrible » : des hommes brûlés par d’autres hommes dans une machine. Cauchemar ou réalité ?… Le marchand de dents de vampire veut y aller de son couplet philosophique. Mais, très vite, Roy Andersson l’envoie au lit ! Tel est ce Suédois unique en son genre : il nous offre ses visions, légères ou terribles, profondes sans nul doute, mais modestes. Pour réfléchir sur l’existence, semble-t-il nous dire, il faut rester léger. Comme l’oiseau sur la branche. »
Frédéric Strauss – Télérama
Vernoux (espace culturel Louis Nodon)
vendredi 29 mai à 21h
dimanche 31 mai à 21h
lundi 01 juin à 18h
Lamastre (centre culturel)
dimanche 31 mail à 18h
mardi 02 juin à 21h
Remarquable. Dur et en phase avec le monde d’aujourd’hui. Abordé dans un article s’intéressant au numérique et à l’écriture … Dommage qu’il n’y ait eu un débat à l’issue d’une projection…