Film de Atiq Rahimi
(Drame – Afghanistan / France – 2013 – 1h43 – V.O.S.T.)
Avec: Golshifteh Farahani, Hamidreza Javdan, Hassina Burgan…
film programmé dans le cadre du festival Roman & Cinéma
Au pied des montagnes de Kaboul, un héros de guerre gît dans le coma ; sa jeune femme à son chevet prie pour le ramener à la vie. La guerre fratricide déchire la ville ; les combattants sont à leur porte. La femme doit fuir avec ses deux enfants, abandonner son mari et se réfugier à l’autre bout de la ville, dans une maison close tenue par sa tante. De retour auprès de son époux, elle est forcée à l’amour par un jeune combattant. Contre toute attente, elle se révèle, prend conscience de son corps, libère sa parole pour confier à son mari ses souvenirs, ses désirs les plus intimes… Jusqu’à ses secrets inavouables. L’homme gisant devient alors, malgré lui, sa « syngué sabour », sa pierre de patience – cette pierre magique que l’on pose devant soi pour lui souffler tous ses secrets, ses malheurs, ses souffrances… Jusqu’à ce qu’elle éclate !
« Écrit directement en français, Syngué Sabour a reçu le prix Goncourt 2008. Devenu un film, réalisé par son auteur et adapté par Jean-Claude Carrière, il réussit à restituer parfaitement l’intensité et les émotions d’un huis clos brûlant de sensualité et quasi psychanalytique. Dans un pays qui ressemble à l’Afghanistan, une femme prodigue des soins à son mari, dans le coma depuis qu’il a reçu une balle dans la nuque. Seule avec ses deux enfants, vivant dans la peur, sans ressources, elle est obligée de coucher avec un jeune combattant qui n’a jamais connu l’amour. Puis commence à livrer ses secrets à son époux inconscient après avoir pris conseil auprès de sa tante, qui vit dans un bordel. Elle raconte d’abord ses états d’âme, ses craintes, mais peu à peu, les confidences deviennent de plus en plus incroyables, sexuelles et libératoires. Syngué Sabour parle d’amour, du corps des femmes, du plaisir, du mensonge, de la frustration, dans un pays où tout ce qui touche au sexe est tabou, mais où la prostitution prospère. On peut y voir mille choses mais surtout la dénonciation de l’intégrisme et des barbus, qui ne brisent pas que les femmes mais aussi les hommes, une population « opprimée sexuellement, religieusement, politiquement, culturellement, socialement… », dit Atiq Rahimi. L’actrice iranienne Golshifteh Farahani prête son talent à ce monologue magnifique, bouleversant et subversif. Il n’empêche : « Le film a été projeté dans une salle de cinéma à Kaboul devant des étudiants des Beaux-Arts, poursuit le réalisateur. Il faut montrer aux musulmans le sens caché de nos mythes. »
D.A. – Le Journal du Dimanche
Vernoux en Vivarais (Salle Louis Nodon)
samedi 05 octobre à 21h